Wiigwaas

Confection

Le processus de fabrication suppose un partage des connaissances. Pour Morrisseau, la création d’œuvres d’art à l’aide de wiigwaas s’appuie sur des liens profonds.

Écorce de bouleau, photographie, DHatier Public Domain.

Le wiigwaas doit être récolté et préparé avant de servir à la fabrication de paniers, de canots et d’autres objets. Les récits partagés par Morrisseau et d’autres personnes gardiennes du savoir mettent en lumière les modes relationnels du savoir lié au territoire.

La cueillette de l’écorce de bouleau a lieu à certaines périodes de l’année, en mai et en juin, et est associée à la réciprocité, au respect et à la connaissance du lieu.

Dans cette lettre, écrite par Morrisseau à Selwyn Dewdney en 1961, l’artiste parle de l’utilisation de l’écorce de bouleau pour une exposition potentielle à la Hughes Gallery à London, en Ontario. Morrisseau explique qu’il est « difficile d’obtenir des morceaux d’écorce quand la sève commence à couler et reste sur l’arbre plutôt que de l’écorce, mais je vais faire ce que je peux, OK. »

Norval Morrisseau, Dewdney Archival Letter, 25 avril 1961.

Panier en écorce de bouleau fabriqué par Mme Annie Kakegamic et peint par Norval Morrisseau

Les Ojibway se rendaient au lac Mesinama Sahegun pour se régaler d’esturgeons. Tout le monde était heureux. Les vieilles femmes et les jeunes préparaient l’esturgeon fumé et le plaçaient dans des récipients en écorce de bouleau pour les longs mois d’hiver à venir. 

Norval Morrisseau, Legends of My People: The Great Ojibway, 1965, p. 34. Cette citation de Norval Morrisseau est lue en anglais par Logan Fiddler, arrière-petit-fils de Norval Morrisseau, 2023. 

La belle-mère de Morrisseau, Tante Annie Kakegamic, a fabriqué ce panier. L’artiste y a peint l’un de ses principaux motifs emblématiques : un cercle fragmenté entouré de rayons de soleil. Morrisseau utilise ce motif pour exprimer l’équilibre et celui-ci renvoie aussi à migiis, un récit sacré.

En début de carrière, Morrisseau peint plusieurs paniers fabriqués par des membres de sa famille, mais d’autres artistes et adeptes le poussent à délaisser cette forme artistique en raison de ses associations avec l’artisanat.

Annie Kakegamic à la fabrication de récipients en écorce de bouleau. Basketmaker est l’une des rares œuvres de Morrisseau qui montrent une personne en pleine création artistique.

Norval Morrisseau, The Basket Maker Making the Basket, 1970.

Saul Williams parle de The Basket Maker Making the Basket, 1970.

Saul Williams explique comment la fabrication des paniers en écorce de bouleau est devenue une marchandise, vendue par les vanniers de Sandy Lake, en Ontario, pour subvenir aux besoins de leur famille.

    Norval Morrisseau, Untitled (The Horned Snake), 1958.
     

    Morrisseau a peint une de ses premières œuvres de serpent cornu sacré à la fin des années 1950. Celle-ci fait partie de la collection de Joseph et Esther Weinstein, qui ont soutenu et conseillé Morrisseau pendant leur séjour à Cochenour, en Ontario. Le serpent blanc en forme de spirale porte un sac-médecine en plus de posséder des éléments décoratifs à l’intérieur et autour de son corps sinueux.

    L’image de cette œuvre ne représente pas une tente tremblante, mais une madoodiswan ou tente de sudation. Morrisseau décrit la tente de sudation comme une « maison à vapeur qui ressemblait à un bol renversé, composée de jeunes arbres et recouverte de peaux ou de toile, avec un sol tapissé de branches de cèdre… elle purifie le corps et l’âme… certains hommes-médecine s’en servaient pour parler au dieu aquatique, à l’Oiseau-Tonnerre ou aux serpents-médecine… » 

    Norval Morrisseau, Legends of My People: The Great Ojibway, 1965, p. 52.

    Dans cette œuvre, les Wugeesh – Gukawiininwuk portent aussi des robes rouges et battent un tambour sacré.

    Au début de sa carrière, Morrisseau créait souvent ses œuvres sur wiigwaas, car ce support s’avérait disponible au début de l’été en plus de rappeler l’interdépendance entre tous les êtres vivants. 

    Norval Morrisseau, Ancestors Performing the Ritual of the Shaking Tent, 1958-61.

    Norval Morrisseau, Thunderbird with Ancestral Motifs, c. 1961.

    Un élément clé pour comprendre le lien qu’entretient Morrisseau avec le wiigwaas réside dans le partage des connaissances sacrées par son grand-père Moses Potan Nanakonagos, un chaman de la Medewiwin ou la Grande loge de médecine des Anishinaabeg.  

    Traditionnellement, les rouleaux d’écorce de bouleau renfermaient des récits sacrés. Ils se composaient de feuilles d’écorce de bouleau cousues ensemble pour former de longs rouleaux incisés dont les extrémités se fixaient à des bâtons attachés à l’écorce par des bandes de corde de l’arbre – le même matériau qui servait à coudre les feuilles d’écorce de bouleau ensemble.

    Le tableau Thunderbird with Ancestral Motifs (1961) de la collection Westerkirk recourt à des techniques de composition semblables à celles dont l’artiste se sert pour transmettre son savoir issu des récits dans ses œuvres.

    Si Morrisseau connaissait bien l’usage sacré des rouleaux d’écorce de bouleau et employait des techniques traditionnelles, ces éléments cérémoniels lui servaient uniquement d’expression artistique.

    Retour au haut de la page